Analyse des réseaux sociaux: la force des liens faibles – M. Granovetter, R. Burt…

Les schémas

immersion

Une cartographie des liens par le logiciel Immersion du MIT (disponible en freeware)

Trous

Les trous structuraux (R. Burt 1995)

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Définition des principaux concepts

L’analyse des réseaux sociaux s’intéresse plus à la structure du tissu relationnel des individus qu’à la signification des échanges opérés dans les réseaux. On peut distinguer ici plusieurs approches théoriques différentes (voir Chauvet et Chollet 2010, voir Girard 2012), mais elles s’opposent toutes aux théories de la communication qui mettent en avant le canal, le feedback, le langage, ou le contexte.

1. L’approche par les graphes, Social Network Analysis

L’ARS (Analyse des réseaux sociaux, ou SNA Social Network Analysis) regroupe les analyses purement structurales héritières de la sociométrie, qui visent à analyser une cartographie des relations. Le comportement des acteurs sociaux est uniquement considéré en fonction de leur position et de leur rapport aux différentes structures relationnelles (voir Mazzoni 2006, voir Stenger et Coutant 2010, voir Mercanti-Guérin 2011).

On calcule par exemple la centralité (nombre de contacts), la longueur des chemins entre les sommets du graphe, le nombre de chemins qui passent par un individu, on définit les grappes ou clusters… (voir par exemple une analyse de la centralité sur des réseaux sociaux, par Cucchi et Fuhrer, 2013).  On peut en voir facilement certains résultats sur ses propres messages Gmail (avec Immersion, du MIT), sur son propre réseau Facebook (avec WolframAlpha), sur sa propre navigation avec Firefox (avecLightbeam) ou sur les déplacements de son propre téléphone Android (avec Location History). Voir aussi l’outil Gephi et ce guide pratique pour réaliser un sociogramme de type ARS.

  • Ces analyses purement quantitatives d’un réseau social peuvent etre utilisées dans les organisations, mais avec des problèmes de biais liés à la définition problématique de l’étendue du réseau pris en compte (voir Chollet 2008). E. Pammier (2008) détaille ainsi les fondements théoriques de deux approches dans l’ARS : l’approche structurale quantitative de réseaux « complets » et une approche plus qualitative à partir des réseaux individuels.
  • Mais l’ARS est surtout aujourd’hui une des méthodes de l’analyse des mégadonnées sur le Web (Big data), avec un succès bien sûr lié aux possibilités de prédiction de comportements, mais là aussi avec de nombreux biais possibles : voir Stenger et Coutant 2010, voir Boyd et Crawford 2011.

2. L’approche par « la force des liens faibles »

M. Granovetter (1983) considère que seuls les liens faibles permettent de relier des groupes différents pour accéder à des informations nouvelles.

  • Les liens faibles sont caractérisés par une faible quantité d’interactions dans le temps, une faible intensité émotionnelle, peu de confiance et peu de services réciproques, mais ils permettent en revanche de rentrer en contact avec un plus grand nombre d’individus (ce que promettent aujourd’hui les réseaux sociaux numériques : étendre la connaissance de ses « liens faibles », en les rendant transparents, de manière à pouvoir ensuite les mobiliser, voir Théories du capital social).
  • Les liens forts (encastrements familiaux, ethniques, professionnels…) permettent certes le transfert des connaissances tacites, privées ou sensibles, mais ils sont en revanche cloisonnés à l’intérieur d’une même « clique ».

Voir ci-dessous dans les références : la vidéo d’Isabelle Huault et le cours de Rémi Bachelet sur SlideShare.

3. L’approche par les « trous structuraux »

R. Burt (1995) va plus loin en valorisant l’absence de ponts entre les différents groupes relationnels, absence bénéfique dans les situations d’exploration pour faire émerger des connaissances, des idées, des interprétations diverses : ce n’est pas le simple nombre de contacts qui est important, mais surtout le nombre de contacts non redondants. Le capital social représente alors l’avantage créé par une richesse de trous structuraux au sein d’un réseau assez grand, peu interconnecté et non hiérarchique (sur une mesure de ces trous structuraux, voir Chollet 2006).

4. L’approche par les « ressources sociales accessibles »

N. Lin (1995) considère moins la force/faiblesse des liens que la nature des ressources accessibles grâce à ceux-ci : statut social du contact, diversité des attributs hiérarchiques et fonctionnels des contacts… Car il ne suffit pas d’avoir « un bon réseau » (un capital social latent), mais il faut pouvoir le mobiliser (par des démarches qui vont faire intervenir ses relations sociales)  (voir Girard 2012).

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Voir les autres théories utilisées dans le développement des SI

Voir la carte générale des théories en management des S.I.

RÉFÉRENCES

Mark Granovetter (1983), The Strength of Weak Ties: A Network Theory Revisited, Sociological Theory, Vol. 1

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Ronald Burt (1995), Le capital social, les trous structuraux et l’entrepreneur, Revue française de sociologie, Volume 36, Numéro 4

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Nan Lin (1995), Les ressources sociales : une théorie du capital social, Revue française de sociologie Volume 36, Numéro 4

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T. Stenger, A. Coutant (2010), Les réseaux sociaux numériques : des discours de promotion à la définition d’un objet et d’une méthodologie de recherche, Journal of Language and Communication Studies n° 44

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V. Chauvet, B. Chollet (2010), Management et réseaux sociaux. Bilan et perspectives de recherche, Revue française de gestion Vol 3 n° 202

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E. Pammier (2008), L’analyse des réseaux sociaux : théories, concepts et méthodologies, Sociological Review of Vietnam, 4 (104)

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D. Boyd, K. Crawford (2011), Six Provocations for Big Data, Communication, Oxford Internet Institute. Traduction sur www.internetactu.net

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M. Mercanti-Guérin (2011), Analyse des réseaux sociaux et communautés en ligne : quelles applications en marketing ? Management & Avenir vol 2 n° 32

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E. Mazzoni (2006), Du simple tracement des interactions à l’évaluation des rôles et des fonctions des membres d’une communauté en réseau. Une proposition dérivée de l’analyse des réseaux sociaux. Communication TICE-2006

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A. Cucchi, C. Fuhrer (2013), Capital social et usage des TIC ; une analyse par les réseaux sociaux.  Congrès AIM

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B. Chollet 2006). Qu’est-ce qu’un bon réseau personnel : Le cas de l’ingénieur R&D. Revue française de gestion, no 163,(4)

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B. Chollet (2008), L’analyse des réseaux personnels dans les organisations : quelles données utiliser ? Finance Contrôle Stratégie vol 11, n° 1

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A. Girard (2012), Théorie du Capital Social : des origines diverses et une définition difficile , dans le chapitre 2 de la thèse: « L’intégration des médias sociaux dans les stratégies d’e-GRH », Université de Montpellier.

la thèse ou le Chapitre

I. Huault, Réseau social, solidarité, confiance : la pensée de Mark Granovetter, Vidéo

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R. Bachelet, Réseaux sociaux, Cours sur SlideShare

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